Mars 2023 – Un nombre croissant de villes misent sur la qualité de leur vie nocturne comme un élément clé de leur dynamisme culturel et économique. Cette qualité ne tient pas seulement au nombre d’établissements ou d’événements et à leur offre mais aussi à un aspect essentiel : la sécurité des noctambules.
Le Forum européen pour la sécurité urbaine (Efus) travaille depuis plus de 30 ans pour promouvoir une vie nocturne sûre et faciliter la mise en œuvre de politiques globales de la nuit, à l’échelle locale, élaborées en collaboration avec tous les acteurs pertinents. Ces politiques publiques doivent prendre en compte l’équilibre nécessaire entre le mode de vie festif et la tranquillité des habitants, de même que la diversité des espaces publics.
L’une des activités clés de l’Efus dans ce domaine consiste à organiser et favoriser des échanges et une collaboration directe entre villes européennes autour de leurs politiques et de leurs pratiques.
Des politiques globales de la nuit
Pour les collectivités territoriales, la vie nocturne est un domaine complexe à gérer, notamment parce qu’il implique divers acteurs, autant publics que privés, et différents types de public. Dans son Manifeste Sécurité, Démocratie et Villes, l’Efus affirme que les collectivités territoriales doivent apporter une réponse globale, intégrée, multidisciplinaire et pragmatique qui articule santé, sécurité, mobilité, activités économiques et culturelles, gestion et partage de l’espace public, mais aussi cohabitation entre les différents acteurs qui l’occupent (secteur festif, riverains, noctambules, touristes, travailleurs, etc.).
Depuis une décennie environ, de nombreuses villes en Europe et dans le reste du monde ont adopté une telle approche, par exemple en créant une fonction de Tsar de la Nuit ou de Maire de la Nuit ou similaire.
La prévention du harcèlement sexuel
Ces dernières années, la question du harcèlement sexuel dans et autour des lieux de vie nocturne a fait l’objet d’un intense débat public, notamment à la suite du mouvement #MeToo et de la pandémie de Covid. Les usagers et usagères de la vie nocturne comme les autorités publiques ont lancé des campagnes un peu partout en Europe pour prévenir ce type de délinquance et assister les victimes.
L’approche adoptée avec les dispositifs tels que Demandez Angela, à Bordeaux et d’autres villes européennes (notamment au Royaume-Uni), le label Point violet en Espagne, ou encore le plan de prévention lancé à Bruxelles en 2022 est d’associer les établissements de nuit, en formant leur personnel, et l’entourage des noctambules pour détecter les incidents et assister les victimes en proposant notamment des lieux refuges ou ‘safe places’.
Le projet européen SHINE
L’Efus et ses partenaires du projet européen SHINE, mené par l’Université de Maribor (Slovénie), ont travaillé pendant trois ans (2020-2023) sur une telle approche. Avec les villes de Vilnius (Lituanie) et Ljubljana (Slovénie) comme partenaires, la recherche et les solutions développées dans le cadre de SHINE peuvent être appliquées par toute ville soucieuse d’offrir une vie nocturne sûre pour toutes et tous.
Évaluer la situation sur le terrain
Les partenaires de SHINE ont commencé par mener une recherche approfondie sur le terrain pour évaluer l’étendue du harcèlement sexuel dans les lieux de nuit à Vilnius et à Ljubljana ainsi que les perceptions des victimes, des responsables municipaux, des représentants de la police, des gérants et personnels d’établissements de nuit et des associations spécialisées dans la prévention.
La recherche a révélé que la définition du harcèlement sexuel est trop restrictive et ne reflète pas correctement l’expérience des victimes. De plus, les incidents sont rarement signalés, ce qui est dû en partie au fait que la définition légale est restrictive, mais aussi à la peur qu’ont les victimes d’être mal comprises ou humiliées et à un manque de confiance général en la Justice et la police. Or ce sous-signalement limite la fiabilité des données disponibles. C’est pourquoi le projet SHINE a aussi pris en compte les définitions ‘culturelles’, ‘sociétales’ et ‘sociologiques’ du harcèlement sexuel, de même que la description qu’en font les victimes et leur propre expérience.
Disséminer SHINE en Europe
Le principal enseignement du projet est la nécessité de renforcer la coopération entre les autorités municipales, la police et les propriétaires/managers et le personnel des établissements de nuit pour prévenir et détecter le harcèlement sexuel dans ces établissements et sur l’espace public. Les partenaires du projet sont également convenus de poursuivre leurs échanges sur les cadres réglementaires.
En tant que partenaire chargé de disséminer les résultats du projet, l’Efus a organisé cinq séminaires avec des villes européennes (Budapest en Hongrie, Louvain en Belgique, Prato en Italie, et Saint Brieuc et Strasbourg en France) au cours desquels des responsables municipaux et leurs partenaires ont échangé avec les experts du projet.
> Vous avez quelques minutes ? Rencontrez les experts SHINE sur notre chaîne YouTube :
● Thierry Charlois, chef de projet Politique de la Nuit, ville de Paris
● Mathilde Neuville, co-fondatrice de l’association Consentis, France
● Cristina Vale Pires, experte en réduction des risques, Portugal
● Aleksandra Ivanković, directrice adjointe de Victim Support Europe
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