Interview avec Luisa Regimenti, Conseillère à la Région du Latium, Italie

Novembre 2025 – Nous sommes heureux d’annoncer que la région du Latium a récemment rejoint l’Efus. Avec une population de 5,7 millions d’habitants et Rome comme capitale régionale, le Latium est un pôle politique, culturel et économique majeur. Nous avons rencontré Luisa Regimenti, Conseillère régionale chargée de la police locale, des autorités locales, de la sécurité urbaine et de l’université.

Quels sont les principaux enjeux en matière de sécurité urbaine dans la région du Latium ?

Luisa Regimenti (LR) : Les statistiques montrent que la sécurité est, après la santé, le domaine qui préoccupe le plus les citoyens italiens. Sans une action politique efficace en matière de sécurité, il ne peut y avoir de croissance économique : la sécurité est une condition préalable au développement régional. C’est pourquoi j’ai proposé d’inclure la question de la sécurité urbaine dans la stratégie de développement régional quinquennale (2023-2028) de la région du Latium.

Les enquêtes sur la perception de la sécurité dans le Latium indiquent que les vols, les fraudes et les agressions figurent parmi les principales préoccupations des habitants. Divers facteurs entrent ici en jeu, notamment la dégradation urbaine, qui est perçue comme un signe de négligence et de manque de contrôle. Les trottoirs abîmés, les parcs publics mal entretenus, les murs couverts de graffitis… tout cela donne une impression d’abandon et de désordre. De plus, le manque d’éclairage public la nuit génère de la peur. La présence de squats, de bâtiments occupés illégalement et d’infrastructures où le taux de criminalité est plus élevé, comme les gares, contribue également à accroître le sentiment d’insécurité, qui est particulièrement élevé dans les banlieues des grandes villes comme Rome.

Dans ces zones, le manque de services, la pauvreté et la marginalisation sociale peuvent contribuer à un sentiment d’abandon et d’insécurité. Ce phénomène met en évidence la nécessité d’une approche de la sécurité urbaine qui ne se limite pas à la prévention de la, mais qui inclut également la régénération urbaine et le renforcement de la cohésion sociale.

Quelles sont les principales priorités des autorités régionales pour répondre à ces défis ?

LR : La région du Latium suit une stratégie intégrée en matière de sécurité urbaine qui vise à renforcer la synergie entre les forces de l’ordre et les forces de police locales, en garantissant une approche multipartie de la prévention et de la lutte contre la criminalité.

Les quatre principaux domaines d’intervention sont les suivants :

  • soutien aux forces de police locales
  • lutte contre la dégradation urbaine
  • prévention sociale de la criminalité
  • diffusion d’une culture de la légalité.

Le soutien aux autorités locales est un pilier fondamental de l’action régionale.

La région du Latium finance l’achat de nouveaux équipements, notamment des véhicules adaptés à différents types de terrain et des systèmes de communication avancés. Nous encourageons également la formation continue du personnel, avec des formations sur des questions émergentes telles que la gestion des crises, la cybercriminalité et l’application des réglementations en matière de sécurité urbaine. Ce soutien renforce l’autonomie et l’efficacité des municipalités dans la gestion de la sécurité sur leur propre territoire, leur permettant de répondre plus rapidement et plus efficacement aux besoins des citoyens.veness of municipalities in managing security in their own territory, enabling a faster and more efficient response to citizens’ needs. 

La Région intervient également sur le sentiment d’insécurité des citoyens à travers des projets de régénération urbaine. Cela comprend l’amélioration de l’éclairage public, l’entretien des espaces verts et la réhabilitation d’espaces publics négligés, tels que les passages souterrains. Ces interventions, fondées sur la théorie des fenêtres cassées, contribuent grandement à réduire le sentiment d’abandon, de désordre que peuvent éprouver les citoyens. Un environnement urbain bien entretenu est un puissant outil de prévention de la délinquance.

La sécurité urbaine va bien au-delà du contrôle d’un territoire donné ; elle comprend également la prévention des causes profondes de la criminalité. À cette fin, la région du Latium finance des projets visant à prévenir le décrochage scolaire, à promouvoir l’inclusion sociale et à soutenir les groupes de population les plus vulnérables. Ces programmes, qui impliquent souvent les écoles et les associations, visent à offrir des possibilités de croissance et d’intégration en réduisant les facteurs de risque pouvant conduire à la déviance et à la délinquance juvénile.

La technologie est-elle un élément important de votre stratégie de prévention de la criminalité ?

LR : En effet, les défis en matière de sécurité urbaine deviennent de plus en plus complexes et évolutifs, et il est de plus en plus nécessaire de disposer d’équipements de pointe, tels que des systèmes de vidéosurveillance haute résolution, qui permettent une surveillance plus efficace et plus détaillée des zones critiques, et l’utilisation de l’intelligence artificielle (IA) pour analyser les données en temps réel, identifier les comportements suspects, tels que les rassemblements inhabituels ou les objets abandonnés, et envoyer des alertes automatiques aux forces de l’ordre.

Dans ce contexte, les drones jouent un rôle de premier plan, et leur utilisation pour le contrôle du territoire a fait l’objet d’un investissement important de la part de la région du Latium. Dans le cadre de l’appel à projets Police Locale 4.0, la région a offert aux municipalités un soutien financier pour l’achat de ces équipements de pointe. En outre, l’initiative comprenait une formation professionnelle pour les opérateurs de drones certifiés, afin de garantir que le personnel de la police locale soit correctement formé pour utiliser ces technologies de manière efficace et sûre, en totale conformité avec la réglementation en vigueur.

Quelle est l’importance de l’intelligence artificielle dans vos projets actuels et comment la mettez-vous en œuvre ?

LR : Nous considérons comme une priorité le développement de projets basés sur l’IA, qui représente un changement de paradigme, passant d’une approche réactive, basée sur la réponse à un événement qui s’est déjà produit, à une approche proactive et prédictive.

Les systèmes basés sur l’IA peuvent analyser en temps réel de grandes quantités de données (flux vidéo, données de trafic, signalements) afin d’identifier des schémas et des anomalies qui seraient invisibles à l’œil nu. Cela permet d’anticiper les problèmes potentiels, d’optimiser l’utilisation des ressources et d’assurer une réponse plus rapide et plus efficace. Lorsqu’elle est utilisée de manière responsable et conforme aux réglementations en matière de protection de la vie privée, telles que le règlement général de l’UE sur la protection des données (RGPD), l’IA améliore non seulement les capacités opérationnelles des forces de police, mais contribue également à créer un environnement urbain plus sûr, plus résilient et géré de manière intelligente.

Plus précisément, suite à l’approbation de notre premier plan triennal pour les forces de police locales, nous travaillons sur un projet ambitieux visant à créer et à moderniser des salles de contrôle de pointe, capables d’intégrer des données provenant de multiples sources et d’utiliser l’IA pour améliorer la prise de décision en temps réel. Ce projet a des objectifs clairs et mesurables, tels que l’amélioration des interventions de sécurité urbaine, la réduction des temps de réponse en cas d’urgence grâce à l’analyse des données en temps réel, et l’optimisation de la gestion des ressources policières locales en déployant le personnel de manière plus stratégique et ciblée.

En tant que nouveau membre de l’Efus et du Forum italien pour la sécurité urbaine (FISU), qu’attendez-vous de votre adhésion au réseau ?

LR : L’adhésion de la région du Latium à des réseaux stratégiques tels que l’Efus et le FISU (Forum italien pour la sécurité urbaine) est une étape fondamentale pour relever les défis de la sécurité urbaine de manière collaborative et innovante.

Ce partenariat nous offre l’opportunité de collaborer avec d’autres autorités publiques et organisations européennes et italiennes, d’apprendre de leurs expériences et de s’inspirer de leurs pratiques. Cet échange de connaissances est essentiel pour aborder des questions communes telles que la gestion des grands événements, le contrôle du territoire et la prévention de la radicalisation menant à la violence.

La région du Latium peut apporter son expérience en matière de gestion de la sécurité dans une grande zone métropolitaine dotée d’un patrimoine historique et culturel unique, comme Rome. Un autre avantage pour nous est qu’être membre de l’Efus nous ouvrira des possibilités de participer à des projets de recherche et d’innovation financés par l’UE pour développer de nouvelles méthodologies et technologies pour la sécurité urbaine. Nous le ferions par le biais de consortiums internationaux, en collaborant avec d’autres villes et institutions européennes pour développer des projets communs sur des questions spécifiques, telles que la sécurité des espaces publics, la prévention de la délinquance juvénile ou la gestion des flux touristiques, en partageant des données et des analyses et en accédant à des formations spécialisées.

Cette approche collaborative et la possibilité de tirer parti de ressources et de connaissances à l’échelle internationale contribueront à placer la région du Latium à l’avant-garde des politiques de sécurité urbaine, devenant ainsi une référence en matière d’innovation et de bonnes pratiques dans ce secteur.

Photo en haut : le Colisée à Rome, région du Latium, ©iStock Cristian Lourenço