Paris, France, janvier 2021 – Comment les villes et les acteurs de la sécurité locale peuvent-ils mieux protéger leurs espaces publics vulnérables et leurs citoyens ? C’est à cette question que le projet PACTESUR (Protecting Allied Cities against TErrorism by Securing Urban aReas), mené par la Ville de Nice et dans lequel l’Efus est partenaire, cherche à répondre depuis janvier 2019. Deux ans après son lancement, l’Efus revient sur les avancées du projet et pose les défis à venir.
I. Une approche globale et intégrée de la sécurisation des espaces publics
Le projet PACTESUR vise à renforcer les capacités des villes et des acteurs locaux dans le domaine de la sécurité des espaces publics face à la menace terroriste principalement, mais aussi contre d’autres risques inhérents à l’espace public. Le projet fédère décideurs locaux, forces de sécurité, experts de la sécurité urbaine, urbanistes, formateurs, artistes de différentes disciplines et autres professionnels afin d’élaborer à partir du terrain de nouvelles politiques locales de sécurisation des espaces publics en Europe face aux différentes menaces.
Un projet dans la continuité de la Déclaration de Nice
Ce projet fait suite à une série d’initiatives de la ville de Nice, avec le soutien de la Commission européenne et de l’Efus, en matière de prévention et de protection contre la menace terroriste. Membre de l’Efus, cette municipalité a été ainsi à l’origine de la Déclaration de Nice du 29 septembre 2017, co-écrite par le réseau Euromed et l’Efus et adoptée par les deux réseaux ainsi que 60 maires de 18 pays. La Déclaration de Nice a été adoptée lors de la conférence des maires de la région euro-méditerranéenne, organisée en 2017 par la ville de Nice et Euromed, avec le soutien de l’Efus, de l’Université de Toulouse Jean Jaurès et de l’Université de Nice Sophia Antipolis.
Le consortium
Outre la ville de Nice, pilote du projet, le consortium réunit l’Efus, les villes de Liège (Belgique) et Turin (Italie), ainsi que l’association italienne des communes du Piémont (Associazione Nazionale Comuni Italiani – Piemonte) et la Métropole Nice Côte d’Azur.
Quatre axes pour améliorer la protection des espaces publics
Le projet est structuré en quatre axes autour desquels les partenaires échangent leurs expériences et réflexions :
Le rôle de l’Efus
Dans le cadre du projet, l’Efus dirige un groupe de travail de 11 villes européennes (Athènes, Édimbourg, Essen, Gdańsk, Leeds, Lisbonne, Londres, Madrid, Munich, Riga, Xàbia) avec des problématiques spécifiques et des connaissances concernant la protection des espaces publics urbains, ainsi qu’un Comité consultatif réunissant 14 experts de divers domaines afin de concevoir des espaces publics sûrs, ouverts et accessibles à tous.
Il dirige également les groupes de travail sur les thématiques : « Normes européennes » et « Coopération transnationale » mis en place avec les partenaires des 11 villes associées et le Comité d’experts associés.
L’Efus coordonne notamment l’édition de Publication Series, un recueil d’articles, entretiens et guides rédigés par le Comité consultatif d’experts et les villes du projet dans l’objectif de contribuer au débat européen sur la protection des espaces publics. Les sujets abordés incluent notamment les défis post-Covid, la sensibilisation des citoyens, l’impact de l’aménagement urbain sur le sentiment d’insécurité, la protection des espaces de culte et l’importance de l’art dans les espaces publics. Parce que les défis auxquels l’espace public est confronté sont en constante évolution, ce recueil se veut être un espace de réflexion et de discussion sur ces questions.
Etablir des synergies avec d’autres projets européens
L’Efus contribue également à disséminer le projet à l’échelle européenne en le présentant lors de conférences et séminaires, dont le colloque « Security by Design » organisé par Bruxelles Prévention & Sécurité le 29 mai 2019, le Congrès sur la Santé, sécurité et qualité de vie de Préventica Marseille du 8 et 9 octobre 2019 ou lors de l’atelier organisé par le projet européen SafeCi en décembre 2020.
Un projet qui s’inscrit dans une réflexion européenne autour de la protection, de l’aménagement et du partage de l’espace public
L’espace public jouit d’un statut particulier dans le domaine de la sécurité urbaine : en effet, il nécessite d’une politique de sécurité qui s’appuie sur une véritable coopération entre les divers organismes et institutions concernés (autorité locale, police, services de secours, représentants des usagers…), c’est-à-dire une coproduction de la sécurité pour garantir que ce type de lieu urbain soit à la fois sûr et ouvert et accessible à tous.
Sur cette thématique, les défis auxquels sont confrontées les villes européennes sont similaires. Par ailleurs, les pratiques dans le domaine de la sécurité peuvent être transposées d’une ville à l’autre à travers l’Europe. Ainsi, le partage d’expériences contribue à améliorer l’action locale mais aussi à créer un savoir collectif.
L’Efus participe actuellement à d’autres projets européens liés à la thématique des espaces publics : PRoTECT, Secu4All, Cutting Crime Impact (CCI) et IcARUS. Il coordonne également avec les villes de Nice (France) et de Madrid (Espagne) le Partenariat sur la sécurité des espaces publics de l’Agenda urbain pour l’Union européenne.
II. Les nouveaux défis
Sécuriser l’espace public urbain face à des menaces évolutives, tout en s’assurant qu’il soit à la fois sûr et ouvert et accessible à tous.
L’évolution de la menace terroriste
Dans l’Eurobaromètre de la Commission européenne de décembre 2017, la sécurité, en particulier le terrorisme, comptait parmi les premières préoccupations des Européens. Aujourd’hui, l’Eurobaromètre d’octobre 2020 montre que le terrorisme est moins une priorité pour les citoyens européens, arrivant à la neuvième place des défis auxquels l’Union européenne (UE) doit actuellement faire face. En date de l’été 2020, la lutte contre le terrorisme était donc une préoccupation pour 7% des sondés contre 44% trois ans auparavant.
Même si on a constaté récemment une légère baisse des attentats terroristes dans l’UE, la dernière vague d’attentats en France (Conflans Ste Honorine et Nice, octobre 2020), en Allemagne (Dresde, octobre 2020) et en Autriche (Vienne, novembre 2020) montre que la menace terroriste demeure importante en Europe. Les espaces publics continuent à être visés, y compris les lieux de culte. Parce qu’ils sont ouverts à tous, ils deviennent vulnérables à différents types de menaces et modes opératoires (véhicules béliers, arme blanche, armes à feu, explosifs ou armes à feu). L’évolution de cette menace, devenue plus diffuse et donc plus difficile à anticiper, constitue un défi majeur pour les États membres de l’UE.
Pour appréhender les enjeux de sécurité dans l’espace public, tout autre incident ayant un risque sur ces espaces et qui est susceptible de mobiliser des acteurs divers de la sécurité doit être pris en compte. Le projet PACTESUR inclut notamment la gestion de foule et les mouvements de panique mais également les risques climatiques, tels les incendies ou inondations.
L’impact de la crise de la COVID-19 sur les espaces publics
Comme l’énonce la nouvelle stratégie de l’UE pour l’union de la sécurité, adoptée en juin 2020, la crise liée au COVID-19 a modifié la nature et la forme des menaces pour la sûreté et la sécurité des Européens : “elle a mis en évidence la nécessité de garantir la sécurité tant dans l’environnement physique que dans l’environnement numérique”.
Cette pandémie a également modifié notre conception et usage de l’espace public. Les villes et ses usagers privilégient les événements en plein-air, les trottoirs sont élargis pour laisser place aux piétons, des terrasses éphémères s’installent, parfois très proches de la chaussée. Ces changements ont créé des situations inédites qui doivent être intégrées et interrogées dans les travaux du projet, afin de s’assurer qu’ils ne contribuent pas à l’apparition de nouvelles vulnérabilités dans l’espace public face aux menaces évoquées précédemment.
Telles sont les questions auxquelles PACTESUR cherche à répondre : sécuriser l’espace public urbain face à des menaces évolutives, tout en s’assurant qu’il soit à la fois sûr et ouvert et accessible à tous.
III. Les activités du projet PACTESUR
La création d’un réseau pluridisciplinaire d’acteurs
Le partage d’information, de savoir-faire et d’outils non seulement entre représentants de collectivités territoriales européennes et acteurs locaux de sécurité mais aussi entre urbanistes et experts de la sécurité et du terrorisme est essentiel pour l’élaboration de nouvelles politiques locales de sécurisation des espaces publics face aux menaces.
Ce projet a permis de construire et de consolider un réseau pluridisciplinaire d’échange entre d’acteurs impliqués dans le domaine de la sécurité des espaces publics en Europe.
AXE 1 : L’étude des standards, des cadres juridiques et de la gouvernance locale
Les collectivités locales ont un rôle fondamental comme échelon de gouvernance le plus proche des citoyens. La question de la gouvernance locale de la sécurité est primordiale pour les partenaires du projet. Trois réunions annuelles sont organisées afin d’identifier les priorités avec les partenaires associés au projet et le réseau et préparer une étude comparative des standards de la gouvernance locale dans les différents pays européens, qui sera assortie de recommandations destinées aux gouvernements nationaux et aux institutions européennes.
Le fait que les législations soient différentes d’un pays européen à l’autre a des conséquences concrètes lors d’une situation de crise, ce qui amène le projet PACTESUR à réfléchir sur la question de la création d’un cadre commun européen. L’un des produits résultant du projet sera précisément une étude comparative des législations en vigueur dans les différents pays européens, qui sera assortie de recommandations destinées aux gouvernements nationaux et aux institutions européennes.
AXE 2 : L’élaboration de formations spécialisées pour les acteurs de sécurité locaux
Le projet PACTESUR propose des formations européennes spécialisées pour les acteurs de la sécurité dans les trois villes partenaires afin de les doter des connaissances et outils nécessaires pour mieux sécuriser leurs espaces publics.
Lors de la Semaine européenne de la Sécurité à Nice en septembre 2019, une formation de 3 jours a été dispensée à 45 policiers de 15 villes européennes au Centre d’entraînement Arnaud Beltrame du Fort de la Batterie russe. Les policiers ont également visité les installations de sécurité du tramway. Deux autres formations sont prévues à Turin et Liège cette année (2021).
AXE 3: La sensibilisation des citoyens et des responsables politiques locaux à leur rôle en faveur de la prévention et de la sécurité
Réunissant des représentants de collectivités territoriales européennes et de la police ainsi que des experts européens, les Semaines de la Sécurité de Nice, Turin et Liège sont les événements de dissémination majeurs du projet PACTESUR. Elles ont pour objectif de sensibiliser les citoyens et des responsables politiques locaux à leur rôle en faveur de la prévention et de la sécurité. C’est aussi l’occasion de présenter les principaux résultats du projet et de partager l’expérience des 11 villes partenaires et du groupe d’experts multidisciplinaires.
La première édition de la Semaine européenne de la Sécurité a tenu ses assises à Nice en octobre 2019 tandis que la deuxième édition a été accueillie par la Ville de Turin de façon virtuelle en octobre 2020. Elles ont été consacrées aux menaces terroristes, à la gestion et la communication de crise, à l’aménagement urbain et à l’utilisation des outils numériques. La dernière a également abordé l’impact du Covid-19 sur la gestion des espaces publics, dont les dangers liés à la surveillance numérique, qui ont été exacerbés par la crise sanitaire, ou la gestion de l’anxiété sociale dans les espaces publics.
À travers des débats ouverts au grand public, comme les Ateliers de Gouvernance Locale ou les Semaines Européennes de la Sécurité, le projet souhaite donner une voix aux citoyens et à la société civile autour de la réflexion sur la prévention et la sécurité des espaces publics.
Le rôle de la Sustainable Design School
La Sustainable Design School (SDS), une école de design basée près de Nice à Cagnes-sur-Mer, est un partenaire associé du projet PACTESUR. A partir d’entretiens de terrain, elle a réalisé une étude sur le sentiment d’insécurité des utilisateurs de la Promenade des Anglais. Cette approche ludique, présentée lors de l’Atelier de Gouvernance Locale de Nice, permet de recueillir les besoins et les attentes des utilisateurs des espaces publics afin de s’assurer que la réflexion sur la sécurité inclue des diagnostics multi-acteurs au niveau local.
AXE 4 : L’identification des investissements locaux les plus adaptés pour sécuriser les espaces publics et touristiques, tout en évitant de les transformer en forteresses
Sous cet axe, le projet vise à développer trois équipements pilotes de sécurisation des espaces publics à Nice, Liège et Turin, transférables à d’autres villes européennes. Une attention particulière est donnée à leur intégration dans le paysage urbain, le patrimoine naturel et culturel, l’esthétique, le design et la mobilité urbaine pour éviter une « bunkerisation » des espaces publics. Ces équipements reflètent également les différentes approches des trois villes en matière de sécurisation des espaces publics.
- A Nice, un dispositif pour protéger la Promenade des Anglais a été développé, notamment pour prévenir des attaques comme celle du 14 juillet 2016 par un camion-bélier. En décembre 2019, des représentants de villes associées, du comité d’experts et du consortium ont visité le réaménagement de la Promenade des Anglais puis ont travaillé ensemble à l’élaboration de recommandations permettant à la ville d’améliorer les performances de cet équipement ainsi que son intégration dans le paysage urbain.
- A Liège, un dispositif composé de barrières amovibles pour protéger la place Saint Lambert et Le Carré est en cours de mise en place.
- A Turin, un dispositif de haute technologie pour la maîtrise des foules va être installé sur la Piazza Vittorio Veneto, avec pour objectif notamment d’éviter des mouvements de panique/foule, comme celle du 4 juin 2017 lors de la projection de la finale de la Ligue des Champions.
Les prochaines étapes du projet en 2021
La publication finale du projet inclura des études de cas et des factsheets avec des outils concrets sur un ensemble de thématiques, dont la communication, l’innovation et la coopération en matière de gestion de crises.
Printemps 2021 : Le deuxième Atelier de Gouvernance Locale de Liège.
Été 2021 : La troisième Réunion Annuelle, accueillie par une des villes associées.
Automne 2021 : Le troisième et dernier Atelier de Gouvernance Locale de Turin, ainsi que la formation spécialisée pour les acteurs de sécurité.
Octobre 2021 : La conférence internationale Sécurité, Démocratie et Villes de l’Efus, où les partenaires du projet présenteront les résultats du projet.
1.Eurobaromètre 2020 de la Commission européenne – https://ec.europa.eu/commfrontoffice/publicopinion/index.cfm/Survey/getSurveyDetail/instruments/STANDARD/surveyKy/2262
2. Pour les dernières données chiffrées, consultez le rapport TESAT (Terrorism Situation and Trend Report) d’Europol https://www.europol.europa.eu/activities-services/main-reports/european-union-terrorism-situation-and-trend-report-te-sat-2020 .
3. Communication de la Commission du 24 juillet 2020 relative à la stratégie de l’UE pour l’union de la sécurité https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/?uri=CELEX%3A52020DC0605
À propos de PACTESUR
Le projet PACTESUR vise à renforcer les capacités des villes et des acteurs locaux dans le domaine de la sécurité des espaces publics confrontés aux menaces, entre autres, terroristes. A travers une approche ascendante, le projet fédère décideurs locaux, forces de sécurité, experts de la sécurité urbaine, urbanistes, développeurs informatiques, formateurs, designers et autres professionnels afin d’élaborer de nouvelles politiques locales européennes pour sécuriser les espaces publics contre le risque d’attentat terroriste.
Le projet est financé à 90% par le programme Sécurité Intérieure de la Direction générale Migration et Affaires intérieurs de la Commission européenne.
Contact:
Tatiana Morales, Programme Manager: morales@efus.eu
Martí Navarro Regàs, Programme Manager: navarroregas@efus.eu
Marta Pellón Brussosa, PACTESUR Communication Officer: pellonbrussosa@efus.eu