Juillet 2025 – En réponse à une préoccupation grandissante chez nos collectivités membres, nous avons récemment ajouté la santé mentale aux domaines d’action du Forum européen pour la sécurité urbaine (Efus). À ce titre, nous développons des échanges entre nos membres en Europe afin de recueillir des connaissances et de promouvoir des initiatives visant à prévenir ou à atténuer l’impact des problèmes de santé mentale sur la sécurité urbaine.
Nouveau projet financé par l’UE
Nous avons également rejoint en tant que partenaire un nouveau projet financé par l’UE, intitulé Respect to Protect, qui vise à former les professionnels de la protection et de la sécurité à un traitement digne et respectueux des personnes présentant des troubles de santé mentale.
Le point de départ du projet est le besoin identifié de former les acteurs de la sécurité et de la prévention de la délinquance afin de mieux prévenir et répondre aux situations impliquant des personnes souffrant de troubles mentaux, alors que le manque de connaissances adéquates conduit souvent à une stigmatisation, une discrimination et un isolement social accrus des personnes concernées. Le projet vise à garantir que ces acteurs puissent faire face à ces situations avec respect et dignité, tout en préservant leur propre bien-être mental.
Des répercussions dans tous les domaines
Les problèmes de santé mentale ont augmenté de façon significative en Europe depuis la pandémie de Covid en 2020, en particulier (mais pas exclusivement) chez les jeunes. L’Eurobaromètre 2023 sur la santé mentale a montré que 59% des personnes âgées de 16 à 24 ans avaient souffert d’un problème émotionnel ou psychosocial – tel que la dépression ou l’anxiété – au cours des 12 mois précédents.
Ceci a un impact significatif sur la santé publique, mais aussi sur la population active et donc sur l’économie, ainsi que sur les familles, l’éducation et la sécurité urbaine en général. Nos collectivités membres nous disent qu’elles sont souvent amenées à intervenir dans des situations où la santé mentale affecte directement la sécurité urbaine au quotidien. C’était d’ailleurs l’un des thèmes abordés lors de notre conférence Sécurité, Démocratie et Villes 2024 à Bruxelles, avec une session consacrée à la santé mentale dans les espaces publics.
Les personnes souffrant de troubles mentaux sont plus exposées au risque d’être à la fois auteurs et victimes de troubles à l’ordre public et de délits. En outre, les citoyens qui ne se sentent pas en sécurité dans leur ville sont plus susceptibles de souffrir de troubles mentaux.
Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS) :
- 1 personne sur 6 en Europe souffre d’un trouble mental.
- 1 personne sur 3 souffrant d’un trouble mental ne reçoit pas le traitement dont elle a besoin.
- 1 personne sur 4 souffrant de psychose ne reçoit aucun traitement ou soin officiel.
- Plus de 150 000 personnes meurent chaque année par suicide, soit près de 400 suicides par jour.
- Le suicide est la première cause de décès chez les jeunes âgés de 15 à 29 ans.
- Pendant la pandémie de Covid-19, la prévalence de l’anxiété et de la dépression a augmenté de 25 % dans le monde.
- L’Europe est confrontée à une pénurie critique de personnel de santé, en particulier de professionnels de la santé mentale.
- Plus d’un adolescent sur dix (11 %) présente des signes de comportement problématique sur les réseaux sociaux.
- Un quart des filles de 15 ans déclarent se sentir seules la plupart du temps ou tout le temps.
- Une personne de plus de 60 ans sur quatre déclare se sentir seule.
Une approche globale et transversale
Face à ce que Glenn Micallef, Commissaire européen chargé de l’équité intergénérationnelle, de la jeunesse, de la culture et du sport, qualifie de « crise silencieuse » de la santé mentale, les institutions européennes et les gouvernements nationaux élaborent des plans pour mobiliser les services publics et la société civile.
Ainsi, en 2023, la Commission européenne a adopté pour la première fois une approche transversale de la santé mentale, qui constitue l’un des piliers de l’Union européenne de la santé. Dans le cadre de cette approche, 20 initiatives sont financées à hauteur de 1,23 milliard d’euros pour répondre à ce problème qui ne touche pas seulement les jeunes mais toutes les générations, notamment les plus de 60 ans.
Prendre en compte la santé mentale dans toutes les politiques
Le Comité européen des régions, qui représente les autorités locales et régionales européennes, a adopté en avril une opinion sur la santé mentale dans laquelle il reconnaît le rôle important des collectivités dans l’élaboration du paysage de la santé mentale à travers la conception et la mise en œuvre d’initiatives locales et rappelle son soutien à l’approche « santé mentale dans toutes les politiques ».
Les régions et les villes européennes soulignent que toute action en matière de santé mentale doit être globale et intersectorielle, et que la santé mentale et physique doivent être mises sur un pied d’égalité, financées en conséquence et traitées de manière non stigmatisante. Elles rappellent que la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne garantit à la fois le droit de recevoir des soins médicaux et celui d’accéder à la prévention en matière de santé.
« La santé mentale doit être une responsabilité partagée – ancrée dans nos écoles, nos lieux de travail, nos communautés et à tous les niveaux de gouvernement. Elle est au cœur de toutes les politiques publiques ». Yannick Neuder, ministre de la Santé et de l’Accès aux soins
Une priorité du gouvernement français
En début d’année, le gouvernement français a annoncé que la santé mentale serait une grande cause nationale pour 2025, car elle est devenue « un enjeu majeur de santé publique, alors qu’un Français sur quatre sera confronté à un problème de santé mentale au cours de sa vie ». Cette initiative a pour objectif de « lever les tabous, améliorer l’accès aux soins et à l’information, et renforcer la prévention grâce à des actions portées par l’État et ses partenaires ».
L’Organisation mondiale de la santé (OMS) a organisé un sommet à Paris en juin 2025 au cours duquel les représentants de 31 pays européens ont appelé à faire de la santé mentale un élément clé de toutes les décisions politiques nationales. Lors de la conférence, le ministre chargé de la santé et de l’accès aux soins, le Dr Yannick Neuder, déclarait que « la santé mentale doit être une responsabilité partagée – ancrée dans nos écoles, nos lieux de travail, nos communautés et à tous les niveaux de gouvernement. Avec ce sommet, nous envoyons un message clair : la santé mentale est au cœur de toutes les politiques publiques ».
Nos recommandations aux collectivités
S’inspirant des échanges entre nos membres, notre manifeste Sécurité, Démocratie et Villes 2025 comprend une série de recommandations sur la question de la santé mentale, qui tournent autour de trois priorités :
- sensibiliser la population, les élus et les décideurs locaux à l’importance d’une bonne santé mentale et au lien entre santé mentale et sécurité urbaine ;
- former tous les acteurs locaux de la sécurité (personnel des collectivités locales, police locale, médiateurs de rue, associations locales…) ;
- offrir aux jeunes des lieux, tels que les maisons des jeunes, où ils peuvent partager leurs problèmes et être pris en charge par des professionnels.
Initiatives des Forums français et espagnol pour la sécurité urbaine
Preuve supplémentaire de l’importance croissante de cette question dans les politiques de sécurité, le Forum Français pour la Sécurité Urbaine (FFSU) organise régulièrement des sessions de formation pour les agents des collectivités locales et a choisi le thème de la santé mentale pour son Prix prévention de la délinquance (PrixPrev) 2025, qui récompense les initiatives locales pour améliorer sécurité urbaine.
La santé mentale était également l’un des quatre thèmes clés abordés lors de la conférence annuelle du Forum espagnol pour la sécurité urbaine (FESU) en 2023.
Photo : Le Penseur, Auguste Rodin, Musée Rodin, Paris ©iStock – davidf