Groningen, Allemagne, mars 2021 – Partout dans le monde, la réponse à la pandémie de Covid-19 a reposé en partie sur les nouvelles technologies, notamment les applications de contact et de traçage, qui offrent des avantages incontestables tels que la précision, la rapidité et la capacité de gérer de grandes quantités d’informations, mais qui soulèvent aussi des questions sur le respect de la vie privée et l’utilisation des données. Dans le cadre de son travail sur l’utilisation des technologies pour la sécurité, l’Efus a participé à un symposium sur « Les données et l’ordre public – Des pratiques descriptives aux pratiques prescriptives » organisé par l’Université de Groningen, Campus Fryslan (Allemagne), le 11 février.
Un bilan des technologiques développées en réponse à la pandémie
Efus animait l’une des six sessions parallèles. Intitulée « La communication de crise et la protection des données pendant la pandémie de Covid-19 », elle était consacrée aux opportunités et aux risques liés à l’utilisation des données par les institutions publiques. La session constituait une suite à l’une des webconférences organisées par l’Efus en 2020 sur la gestion de crise pendant la pandémie.
Ainsi, en mai 2020, l’Efus avait organisé une webconférence sur les technologies utilisées pour gérer l’épidémie et leur impact sur la vie privée (le compte-rendu est disponible sur Efus Network). À cette période, les pays européens commençaient seulement à développer et tester les applications de contact et de traçage. Six mois plus tard, le symposium a permis de faire un bilan de l’évolution des technologies, de la protection des données et des perceptions du public.
Contextes différents, mêmes technologies, et même efficacité ?
Angela Daly, du Centre Strathclyde sur le droit et les politiques d’Internet à Glasgow (Royaume-Uni), et Anis Fuad, du Centre pour la société digitale de l’Université Gadjah Mada de Yogyakarta (Indonésie), ont évoqué les technologies utilisées en Écosse et en Indonésie, les principaux défis et les problèmes liés à la protection des données.
Angela Daly a expliqué que l’appli écossaise de contact et de traçage a bénéficié d’un taux élevé d’adoption par la population, ce qui est clé pour son efficacité. Elle a souligné qu’un tel résultat n’est possible que si la population a confiance dans le gouvernement et dans ses capacités à gérer les données.
Anis Fuad a raconté comment l’Indonésie a assisté à une augmentation de la télémédecine liée à la pandémie. De nombreuses entreprises de télémédecine renforcent leurs services. Est-ce que cette tendance se poursuivra après la crise du Covid-19 ? Comment seront gérées toutes les données recueillies via ces applications ? Ces questions se posent.
Des garanties en matière de protection des données
Sophie Kwasny dirige l’Unité de protection des données du Conseil de l’Europe et à ce titre est responsable des normes et de la politique en matière de protection des données et de la vie privée. Elle a présenté le rapport du Conseil sur les solutions digitales pour combattre le Covid-19 (Digital solutions to fight Covid-19) qui décrit comment les mesures d’urgence ont affecté le droit à la vie privée et à la protection des données.
Elle a présenté les principes qui s’appliquent dans une situation d’urgence : le principe global de l’État de droit, le principe de nécessité, de proportionnalité, du caractère temporel, du contrôle effectif (parlementaire et judiciaire), la prévisibilité des lois d’urgence, et la coopération loyale entre les institutions publiques.
Le principe d’efficacité est particulièrement intéressant : les technologies utilisées face à la pandémie (applications de contact et de traçage, drones de surveillance, e-bracelets, pour en citer quelques-unes) ont-elles été efficaces ? En d’autres termes, la promesse offerte par la technologie vaut-elle le risque de violation des données ?
Vers une utilisation responsable des données
Andrej Zwitter, doyen du Faculty Campus Fryslan à l’Université de Groningen, a conclu avec quelques réflexions sur l’utilisation responsable des données en cas de crise comme celle de la pandémie. Il a rappelé qu’il existe des moyens garantissant une utilisation sécurisée des données dans de telles situations. Outre les sauvegardes énumérées par Sophie Kwasny, il a souligné que le secteur de l’humanitaire a élaboré des principes tels que le traitement équitable et le droit de rétention et de suppression des données.
Il reste néanmoins des lacunes à combler, telles que le droit des sujets et la nécessité d’élaborer un concept qui prenne en compte la vie privée des groupes, par opposition à la seule prise en compte des droits individuels.